Chronique d'Omnnirath, Janvier 2020
par Omnirath
janvier 2020
« L’état des choses présent nous convient et nous n’avons nullement l’intention de vous accorder la liberté, cette liberté ne se traduirait-elle que par une heure de loisir de plus par jour. Ainsi donc, chers frères, puisqu’il faut que vous suiez pour payer nos voyages en Italie, suez bien et fichez nous la paix. »
Ces mots prêtés à l'élite française par Orwell il y a près d’un siècle ont une résonance toute particulière dans le contexte social glaçant de cette fin de décennie, après des années de libéralisation de l'économie, d’atomisation des individus et de précarisation des salariés ; le gouvernement à ce jour débarrassé des préoccupations sociales et des conservatismes de ses prédécesseurs, s’attaque aux retraites, dont les régimes et applications bien qu’imparfaites furent hérités des luttes sociales et politiques majeures du siècle précédent; jetant l’opprobre sur son universalité pour imposer un modèle de pension à la Bismarck qui comme l’homme de fer a d’avantage à cœur de juguler les mouvements ouvriers et leurs représentants tout en assurant une force de travail corvéable sine labore.
Dans ce moment de l’histoire où la négociation s’opère entre barrages de CRS et syndicats décomposés le rapport de forces s’intensifie entre la rue et le pouvoir incapable de remettre en question sa politique malgré des démissions et critiques d’enchainés, essuyant la nécessaire convergence entre les syndicats réformistes (Laurent Berger) et révolutionnaires (Philippe Martinez), celle-ci devenant le principal obstacle du gouvernement, qui pour mettre fin à cet exercice agonistique espère diviser en proposant un âge pivot à 64 ans, une proposition fracassante d'Édouard Philippe à laquelle tous sont opposés mais où Macron semble étonnamment prêt à la négociation, de quoi rassurer la CFDT et mettre en défaut le syndicalisme de lutte ;un cynisme digne de Machiavel en son temps. En attendant les deux comparses de circonstance font front commun du moins pour un temps, et c’est dans un contexte contestataire sans pareil depuis le projet de loi Woerth en 2010 que Jean-Pierre Farandou successeur de Guillaume Pepy à la SNCF annonce la nomination d’un nouvel état-major composé d’ex-financiers ayant fait leurs armes dans l’audit, à eux donc de transformer “l’archaïque” service public en trois sociétés anonymes privées, la négociation présentée par ce dernier comme une voie sans issue, de quoi renforcer les inégalités sociales avec la pleine approbation de l'État et ses voies de communication, en attendant l'âge de raison d’une nécessaire contestation.